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considérations littéraires, musicales, cinématographiques, politiques et philosophiques...
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20 mai 2016

Session hard-bop inoubliable... * * * *

CLIFF JORDAN, Laconia (Jordan)

 

Quel quintet, mes amis! Voici un disque que je n'ai jamais pu oublier. Et que je n'oublierai jamais. Une merveille, une pépite, un trésor du jazz ! Un amour de musique ! Un de mes premiers coups de coeur du hard-bop il y a une vingtaine d'années quand je traînais encore les fesses à la fac ! Si j'y reviens ce soir, c'est pour la simple raison que les passerelles sont nombreuses en jazz ! En effet, après avoir écouté un thème issu d'une session de Wilbur Ware, le fameux contrebassiste qui allait s'éclipser pendant des années avant de retrouver à la fin des années 60 Don Cherry (la pièce en question, Latin Quarters, est tirée de l'album The Chicago Sound, Riverside, 1957), je me suis tout à coup souvenu de cette session de Clifford Jordan, l'un des saxophonistes ténor les plus remarquables de cette période (1957). Personnellement, je ne l'ai jamais trouvé aussi bon qu'ici. Oui, je sais, certains avanceront la fameuse session de Glass Bead Games (en hommage à John Coltrane)... 1957 donc... La même année, il gravait un album tout aussi savoureux pour le label d'Alfred Lion et Francis Wolff, le génial Blowing in From Chicago aux côtés d'un jeune prodige du saxophone ténor, le grand, l'immense John Gilmore, pour un chase inoubliable et accompli... Clifford Jordan était alors tout jeune (même pas trente ans) et semblait nourrir les plus grands espoirs dans le milieu du jazz. Possédant un son chaleureux et un jeu mélodique hors pair, issu de la même école que Sonny Rollins, il semblait être promis à une grande carrière. Malheureusement, sa discographie est bien maigre et hors mis un passage chez Charles Mingus, quelques galettes avec Art Farmer (ici présent) et un live mémorable dans les années 70 (Glass Bead Games dont on aimerait trouver une réédition à prix réduit...), le saxophoniste restera le plus souvent dans l'ombre médiatique... Cliff Craft est vraiment l'une de ces perles rares du hard-bop... Disque immortel !

Enregistré à Englewood Cliffs en février 1957 (Rudy Van Gelder), la galette présente le saxophoniste dans un line-up de premier choix. En effet, Clifford Jordan est fort bien entouré: Art Farmer est à la trompette et au bugle, Sonny Clark au piano, George Tucker à la contrebasse et Louis Hayes à la batterie, soit une quinte royale à la mécanique bien huilée... Le disque débute sur Laconia, une bossa nova magnifique (avant les succès de Stan Getz). Et il y a de quoi être stupéfait effectivement: c'est peut-être l'un des tout premiers enregistrements d'un thème aux airs afro-cubains par des musiciens de jazz. Bien entendu, Kenny Dorham s'y était essayé quelques années auparavant, et même Fats Navarro, mais là, c'est la claque, ou plutôt une caresse incroyable... Ce thème est d'une saveur inouïe, au niveau des harmonies et de la mélodie elle-même. Composition inoubliable! Le talent des musiciens est d'une évidence absolue: ça pulse, ça swingue, ça sent le sable chaud, l'insouciance, les filles sur la plage, sans vulgarité aucune... De la bonne humeur. Tour à tour, chacun prend son solo, Clifford, Art puis Sonny. Du grand art ! Le thème suivant, Soul-Lo Blues est, comme son titre l'indique, la rencontre entre la soul et le blues, le tout mâtiné d'un hard-bop de bon aloi. Volutes de fumée, ambiance détendue d'un jazz-club, sourires et bien-être sont là encore au rendez-vous.

Cliff Craft, le thème suivant, est un morceau bien enlevé, punchy, typiquement hard-bop: le flux rythmique de Louis Hayes associé à la contrebasse de George Tucker fait des merveilles (les deux formaient déjà la paire rythmique du trio d'Horace Parlan], c'est dire s'ils se connaissaient bien...). Confirmation est un thème de Charlie Parker qui venait de nous quitter. Typiquement bop. Le duo de choc constitué de Farmer et de Jordan s'échappe vers des lignes mélodiques souveraines. Le thème suivant est une balade savoureuse, Sophisticated Lady de Duke Ellington. Lumières tamisées, regard timide, l'expressivité du ténor de Jordan est limpide, d'une beauté irrésistible. Enfin, Anthropology, autre thème parkérien, est un tour de force incroyable. Menée tambour battant, la batterie de Louis Hayes donne à penser à Art Blakey, du moins, lors de ses frappe sèches lors de l'ouverture du thème. Bref, voici un disque épuisé qu'on aimerait voir ressortir sur le catalogue du label Blue Note... Parce que franchement, un disque pareil, c'est de l'or en barre pour nos papilles auditives ! Quand musique et art de vivre sont les deux bornes combinatoires. Aimer le jazz ne vous sera jamais aussi évident qu'ici !

Clifford Jordan Cliff Craft

 

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