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considérations littéraires, musicales, cinématographiques, politiques et philosophiques...
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20 avril 2016

éloge à la crasse...

Miles Davis at the Blackhawk

On vit une époque formidable, j'adore cette époque ! Où on n'a que des réflexes. Où tout est bien balisé, le plus souvent en tout cas, bien propre (enfin ça dépend où vous allez...). Oui, j'adore cette éqoque, la nôtre, où tout s'accélère pour le meilleur et pour le pire. Pour le meilleur, parce que jamais on n'avait vu autant de progrès techniques avec une croissance exponentielle, et à une cadence aussi rapide! J'ai le sentiment que l'internet des objets, et internet tout court, sont en train de modifier de fond en comble notre mode de vie, mais aussi notre pensée, et pire encore notre esprit. Nous nous vantons d'avoir inventé la liberté, mais jamais l'homme n'aura été aussi esclave. Esclave de quoi ? Esclave de son ordinateur, esclave d'internet. Mais ça n'est pas nouveau, déjà 20 ans que ça dure. Personnellement, je me sens esclave de cette machine qui est tout sauf la vie. Le top, pourtant, c'est qu'en un simple clic, je peux ouvrir n'importe quelle fenêtre, avoir accès sur tout et partout (ou par tout) dès que je le désire, quand je le veux : regarder un film, écouter de la musique, lire un article de presse, lire un bouquin (sic) converser avec qui je veux. C'est indéniablement une ouverture extraordinaire sur le monde, une grande fenêtre ouverte; mais à côté de ça je m'interroge (sur le monde, sur moi, sur ma génération, sur les générations à venir), et de me demander si les particularismes de l'individu (ou disons de notre individualité) avec ses projets modestes (la notion même de modestie) ne sont pas en train de disparaître purement et simplement. Nous sommes en mode "esclavage". Impossible de tourner le bouton off. L'heure est, je ne sais comment le dire avec pudeur et sans volonté de heurter qui que ce soit, mais l'heure, oui, est au conformisme généralisé. On veut "plus" et on possède "plus" grâce à internet et ça n'est pas fini. Alors qu'en fait on ne possède jamais rien. Je ne sais que penser de tout cela, de ce magma où tout est beau, rapide, instantané, même les informations les plus insipides sont bien rédigées et largement diffusées. C'est un progrès : on sait quasiment tout sur tout. En art, c'est idem. N'importe qui peut éditer son livre, ou enregistrer son disque. Ou créer son blog...
Mais y a un truc quand même : disques et livres n'ont plus d'odeur. Les blogs, n'en parlons pas. Ils ne sentent plus la poussière ni la crasse (dans tous les sens du terme). Et quand ils sentent la révolte, c'est une révolte compassée, bourgeoise, affectée, fausse, superficielle. Quant au cinéma, il n'est plus tout à fait une critique sociale délivrant un message fort. Et sans parler de message (car c'est triste un message: un message, tu le prends, tu le gobes), je trouve qu'il y a si peu de place pour l'interrogation et le doute... Aujourd'hui, ce qui me fait chier, c'est que tout le monde a raison. Plus personne ne doute. Plus personne ne s'interroge. Et plus personne ne rit en disant (ou en entendant) : "je m'en fous de tes croyances, je m'en cogne de ton mode de vie!" En fait, on n'a jamais eu autant d'intolérances qu'aujourd'hui. Oh, on ne le crie pas sur les toits. Car sous couvert que tout le monde a raison, pourvu qu'il ne m'impose rien, on ne fréquente plus personne. Le résultat est là. Et pourquoi s'il vous plaît? Parce que personnellement, moi non plus je ne supporte pas: "moi j'ai raison", ou "moi je viens m'imposer chez toi et tu vas voir ce que tu vas voir". Je veux dire qu'il n'y a plus de base commune. Ou si peu. La seule base commune à la rigueur, c'est internet... Sinon, on s'emmerde. Notre mode de vie : l'hyper consumérisme pour des choses "futiles" sans doute, histoire d'oublier le vide autour de notre vie (ou dans notre vie...).
Ce matin, je relisais les notes de livret du Miles Davis At the Blackhawk, concert de mai 1961 au fameux club mal famé, mal éclairé, puant, etc. A un moment Ralph Gleason rapporte un élément de réponse qui m'a intrigué et carrément interrogé. Miles répond à une de ses questions et dit ceci :
"si un disque est parfait, ça n'est pas du jazz. Si on ne sent pas tes faiblesses, si on n'y entend pas tes erreurs, tes errements, si on ne ne t'entend pas tâtonner, ça n'est pas du jazz".
Voilà, tout est dit, ou presque. Je veux dire par là que la recherche de la perfection avec internet et les nouvelles technologies, si ça a du bon, d'un autre côté, ça m'inquiète, parce l'on détruit peu à peu notre humanité. On détruit les mauvaises odeurs, on se montre (le "monstre" que voilà) sous son meilleur jour, et finalement, on détruit notre humanité. Donc ce que je voulais dire, c'est 1) au diable les discours vertueux et les objets d'art de luxe 2) au diable tout ce moralisme autour d'internet et des nouvelles technologies, 3) que j'en ai marre du jazz... 4) que j'en ai vraiment marre du jazz et 5) que j'emmerde le jazz... mais que 6) les musiciens peuvent continuer à jouer de la musique...et  7) qu'elle me gonfle de plus en plus cette société de merde. Elle me gonfle vraiment. Ouahla que c'est vrai !
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